Archives Mensuelles: janvier 2014
Kolam : le mandala éphémère au féminin pluriel
Qu’y-a-il de plus triste qu’un parking souterrain dans un immeuble collectif?
En cette fête de “Republic Day”, loin des parades, défilés et discours officiels, les femmes de nos immeubles ont organisé un concours de Kolam. Chacune de équipes participantes s’est vue attribuer la même surface grisâtre de parking pour réaliser son oeuvre éphémère.
Le Kolam est une forme de peinture qui est tracée à même le sol à l’aide de poudre de riz, de la poudre de craie ou de roche blanche, complétées souvent de poudres de couleurs. C’est une tradition du Tamil Nadu, du Karnataka, de l’Andhra Pradesh, de la plupart des régions du Kerala et certaines parties de Goa et Maharashtra. Cet art populaire est aussi pratiqué en Indonésie, en Malaisie, en Thailande et quelques autres pays.
Un Kolam est un dessin aux traits géométriques composé de boucles tracées autours d’une base de points.
En Inde du Sud, il est largement pratiqué par les femmes. Ces dessins sont pensés apporter la prospérité au foyer. Chaque matin, dans le Tamil Nadu, des millions de Kolam son dessinés au seuil des maison ou des appartements avec de la poudre de riz blanche.
Cette oeuvre n’est pas que décorative. Dans les temps anciens, les Kolams de farine de riz arrêtaient les fourmis au seuil du logement en leur fournissant leur nourriture quotidienne. Ils invitaient, également, les oiseaux et autres petites créatures à manger, accueillant ainsi la faune domestique à partager le quotidien: une façon de célébrer la coexistence harmonieuse de tous les êtres vivants avec l’espèce humaine.
C’est un signe d’invitation à tous d’entrer dans la maison pour y recevoir le meilleur accueil. Est invitée aussi Laksmi, la déesse de la prospérité et de la richesse.
Les modèles varient à la sensibilité de chacune, mais partent tous d’une trame composée de points et se déploient en tracés géométriques fermés de manière à empêcher symboliquement les mauvais esprits de pénétrer à l’intérieur des formes, donc de pénétrer dans l’intérieur du logement.
“la musique est la partie maîtresse de l’éducation, car le rythme et l’harmonie sont particulièrement propres à pénétrer l’âme” – Platon
Renault et Nissan vont rapprocher production et recherche


Kerala 08 : Backwater 03
Tel un athanor, la femme au masque serein couvait une ébullition où explosaient les idées les plus contradictoires et les plus perturbantes. […]
Kerala 07 : Backwaters 02
De lourdes barges de bois, d’osier tressé et de bambou transportaient depuis des siècles, voire des millénaires, les riz et épices, les thés et les cafés et tout ce que l’homme voulait déplacer dans ce pays où l’eau et la terre ne font qu’un.
Fi des cardamones, gingembres et cannelles, girofles et muscades, le touriste, désormais, apponte le Kettuvalam, transformé en résidence flottante. Les backwaters se visitent aussi en famille et entre amis.
Il suffit de se laisser glisser dans ce monde encore sauvage où, tel le plumage du cacatoès, la symphonie des verts se laisse éclabousser de scintillements multicolores. La méditation vient en navigant. L’imagination se laisse emporter sur les chemins aquatiques où glissèrent depuis 3 000 ans, Vénitiens et Chinois, Égyptiens et Romains, Phéniciens et Persans.
Si l’imagination ne suffit pas, ouvrons et relisons Agatha Christie ou Gérard de Nerval. Notre mémoire universelle se réveillera au seuil d’un palais hollandais, dans les parvis d’une église portugaise, dans les effluves des encens des temples hindous ou à l’ombre d’une synagogue.
Et si la plume nous en dit, gravons notre rêve au fil de l’eau.
voyage au Kerala proposé par Isabelle Koch pour Shanti Travel sur les barges de la société Evergreen – www.shantitravel.com –
Kerala 06 : Backwaters 01
Qui n’a pas salué le soleil a son apparition sur les Backwaters, n’a pas connu la paix.
A l’aube frémissante, le pêcheur vous invite à le rejoindre dans sa pirogue. Il plonge doucement sa longue gaule et fait danser d’une valse lente son esquif qui caresse plus qu’il ne brise la surface des eaux saumâtres du lagon. Les filets chinois déchirent la lumière du jour encore balbutiante. Ils tissent dans le ciel des dentelles sombres de leurs toiles arachnéennes. Ici tout est paix. Tout est silence.
Bientôt, peu-à-peu, la vie animale ressuscite. Des berges verdissantes s’élèvent un concert où chacun choisit sa partition, son namaskar qu’il chante, pépie, gazouille, babille, ramage ou siffle. Une famille de canards nasille et croise notre imperceptible remous arrière. Quelques rares albatros piaulent cherchant les courants ascendants face au soleil incandescent qui incendie le sommet des cocotiers.
Les hommes arrivent. Les plus fortunés lancent leurs nasses. Les plus modestes, de l’eau jusqu’à la taille ou même jusqu’au cou, pêchent à la main. Les filets de pêche chinois commencent leurs révérences et plongent tour à tour sans abîmer le miroir des eaux. Le passeur initie son va-et-vient qui ne s’achèvera qu’au crépuscule finissant.
“Photo, please?”
Au début, cela surprend, mais on s’habitue rapidement à cette sollicitation: “Photo, please?”. Les Indiens aiment prendre des photos, mais surtout être pris en photo. Et si “quelqu’étranger ” à la peau claire veut bien poser avec eux, cela les comble. Quelques exemples: j’ai été interpellé dans une galerie marchande pour poser avec un jeune-homme… A la porte de l’église commémorative du martyr de saint Thomas, Béa et moi avons été sollicités pour poser avec un groupe de Brahmanes venus en méditation sur ce lieu hautement chrétien… Petite photo entre amis dans les montagnes du Kerala et c’est bientôt un attroupement pour poser avec nous! Les exemples sont quasi quotidiens. Une amie à la peau claire et blonde de surcroît, s’est vue invitée pour des séances de pose devant la porte de l’Inde à Mumbai. Après quelques poses, son refus de continuer à fait de nombreux déçus.
Sommes-nous si rare et si extraordinaire pour tant de demandes? Nous sourions dans de nombreux tableaux de chasse et supposons la fierté des chasseurs d’images avec des trophées où nous figurons à la place d’honneur.
Kerala 05 : Periyar Tiger Reserve

Le lac Periyar s’étend sur 26 km². Il est la conséquence de la construction en 1895 du barrage de Mullaperiyar.
Si le mot “Tigre” apparaît dans son nom, nous n’en avons pas vu l’ombre d’un seul. D’ailleurs notre “croisière” sur le lac Pariyar s’étant déroulée à l’heure de la sieste animale, nous ne découvrîmes de la faune, toutes espèces confondues, que quelques spécimens attardés sur la berge. Les meilleures heures pour l’observation de la vie animale seraient le levé ou le couché du soleil. L’accessibilité des barges est difficiles, tant se pressent de nombreux amateurs et il nous a fallu faire la queue pendant plus de deux heures dans une cohue humaine très indienne, pour obtenir les sésames d’embarquement.
N’empêche! Cette promenade aquatique dans un milieu préservé, est un moment de grâce.
Kerala 04 : Perdre la tête
Fort Kochi. Près de la synagogue.
J’écarte quelques vieux journaux souillés. Un regard goguenard, mais noyé de tristesse me fixe. Qui a déposé contre la margelle de ce puits, sur ce parking sauvage, ce visage buriné et dans quelle intention. L’histoire de ce faciès doit être bien longue et les lèvres closes semblent avoir beaucoup à dire. Beaucoup à raconter. Raconter une histoire, raconter son histoire. Celle d’une pierre arrachée à la montagne et soumise au burin du tailleur de pierres. De cette pierre brute, l’artiste a tiré ce masque. Avait-il sous le maillet de sa naissance ce même regard désespéré qui semble nous dire, telle une épitaphe, semble nous répéter : « j’ai été ce que vous êtes, vous serez ce que je suis. ».
Mais je rêve que cette tête ennoblissait un bas-relief voué à la destruction et que la main qui levait l’outil sacrilège du démolisseur fut retenue par son maître vaincu par ce regard profond, ce regard d’humanité. Ce regard désespéré.